Etre entrainé à la dérive de toute
passion jusqu'à
ce que mon âme devienne un luth
aux cordes tendues
dont peuvent jouer tous les vents,
c'est pour cela que j'ai renoncé à mon
antique sagesse, à l'austère
maîtrise de moi-même.
A ce qu'il me semble, ma vie est
un parchemin sur lequel on aurait écrit
deux fois, où en quelques
jour de vacances, une main enfantine
aurait griffonné de vaines chansons
pour la flûte ou le virelai,
sans autre effet que de profaner
tout le mystère.
Sûrement il fut un temps
ou j'aurais pu fouler
les hauteurs ensoleillées,
où parmi les dissonances de la vie,
j'aurais pu faire vibrer
une corde assez sonore
pour monter jusqu'à
l'oreille de Dieu!
Ce temps-là est-il mort? Hélas!
faut-il que pour avoir seulement
effleuré d'une baguette légère
le miel de la romance, je perde
tout le patrimoine dû à une âme.
Illustration: Alex Katz Texte: Oscar Wilde 3.6.2017